Le Cantal, face à des étés de plus en plus secs
Longtemps préservé par son altitude et son climat de moyenne montagne, le département du Cantal n’est aujourd’hui plus épargné par les vagues de chaleur. Depuis le début des années 2000, les épisodes de fortes chaleurs, de sécheresse et parfois même de canicule se sont multipliés, surprenant les habitants comme les collectivités. Car si l’image du Cantal reste celle de paysages verdoyants et de prairies humides, les réalités du terrain évoluent vite. Et avec elles, les risques pour les populations, l’agriculture, les forêts… et même la ressource en eau.
Un territoire d’altitude pas épargné par la canicule
Le Cantal est un département rural, montagneux, traversé par des plateaux d’altitude (le Cézallier, l’Aubrac, les monts du Cantal) où les températures restaient autrefois modérées. Mais les records de chaleur des dernières années montrent une tendance claire. À Aurillac, par exemple, le thermomètre a dépassé les 38 °C lors de la canicule d’août 2022. Une situation inédite pour cette ville surnommée autrefois « la plus froide de France » ! À Saint-Flour ou Murat, situées plus en hauteur, les habitants ont eux aussi dû s’adapter à des pics de chaleur prolongés.
Ces épisodes ne sont pas sans conséquences. Les établissements de santé et les EHPAD ont dû renforcer leurs dispositifs d’alerte, notamment auprès des personnes âgées. Des salles rafraîchies ont été mises à disposition dans plusieurs communes lors des vagues de chaleur de 2023, un dispositif désormais inscrit dans les plans communaux de sauvegarde.
La sécheresse s’installe et bouleverse les usages
Au-delà des températures, c’est la raréfaction de l’eau qui inquiète. Le Cantal a connu une sécheresse marquée en 2019, puis de nouveau en 2022 et 2023, affectant à la fois les cultures, l’élevage et les forêts. Les arrêtés préfectoraux se sont multipliés pour restreindre les usages de l’eau : interdiction d’arroser les jardins, de laver les voitures, ou encore limitation des prélèvements agricoles.
Les rivières, comme la Santoire ou la Cère, ont vu leur débit chuter à des niveaux alarmants. À Vic-sur-Cère, les fontaines ont été temporairement coupées, et dans certains hameaux isolés, des camions-citernes ont été mobilisés pour assurer l’approvisionnement en eau potable.
Sur le plan agricole, les éleveurs du pays de Salers ou de l’Artense doivent parfois acheter du fourrage dès l’été, faute de prairies suffisamment arrosées. Cette nouvelle donne fragilise l’autonomie alimentaire des exploitations et renforce leur vulnérabilité face aux aléas climatiques.
Des forêts sous tension, un risque d’incendie en hausse
Même si le Cantal n’est pas classé parmi les départements à très haut risque de feu de forêt, les épisodes de sécheresse prolongée augmentent la vulnérabilité de ses massifs. La végétation sèche, les températures élevées et le vent forment un cocktail propice aux départs de feu. En août 2022, un incendie a mobilisé plusieurs dizaines de pompiers à proximité de Riom-ès-Montagnes, dans une zone de pinèdes fortement asséchée.
Les services de l’État ont depuis renforcé la surveillance, notamment en été, en appelant à la vigilance des promeneurs, campeurs et propriétaires forestiers. Le plan départemental de protection contre les incendies de forêt a été actualisé pour intégrer ces nouvelles menaces.
Une mobilisation collective encore à construire
Face à ces évolutions rapides, le Cantal tente de s’adapter. Plusieurs communes ont inscrit la question climatique dans leurs Plans Locaux d’Urbanisme (PLU), et des campagnes de sensibilisation sont menées auprès des habitants. Des réserves d’eau agricoles sont à l’étude dans le sud du département, où les contraintes hydriques se font sentir plus tôt dans la saison.
Mais les marges de manœuvre restent limitées. La ruralité du territoire, la dispersion de la population et le vieillissement démographique compliquent la diffusion d’une culture du risque climatique. La plateforme Vigicrues ou le site de la préfecture restent les principales sources d’information, mais peinent à toucher tous les publics. Certains habitants restent réticents à modifier leurs habitudes, malgré les alertes.
Le département du Cantal, fier de ses racines paysannes et de ses paysages préservés, se retrouve donc à un tournant. Il ne s’agit plus seulement de subir les fortes chaleurs ou de répondre à l’urgence de la sécheresse, mais d’imaginer dès aujourd’hui un autre rapport à l’eau, à l’aménagement du territoire et à la prévention des risques liés au climat. Car si l’altitude offre parfois un répit, elle ne protège plus des bouleversements en cours.