Et si la mer débordait demain matin ?

Imaginez : le vent se lève brusquement, la pluie s’abat sur la ville, et les rues du centre de La Rochelle commencent à se remplir d’eau. Ce n’est pas le scénario d’un film catastrophe, mais un risque bien réel que les habitants de la côte atlantique connaissent : la submersion marine. Pour s’y préparer, les 9 et 10 avril 2025, un exercice grandeur nature baptisé ÉOLE 2025 va mobiliser des centaines de personnes dans l’agglomération rochelaise. L’objectif ? Tester, apprendre, ajuster… pour être prêt le jour où ce ne sera plus un simple exercice.

Une tempête simulée… mais des enjeux bien réels

L’exercice s’appuie sur un scénario fictif mais plausible : une tempête balaye la façade atlantique, avec une combinaison de vents violents, de fortes pluies et d’une marée haute, comme celle qui avait provoqué la tempête Xynthia en 2010. Ce jour-là, 47 personnes avaient perdu la vie en France, principalement à cause d’une montée brutale des eaux.

Cette fois, pas de vrai danger, mais un véritable test de la réactivité collective : 28 communes concernées, 500 personnes mobilisées, des simulations d’évacuation, des mises à l’abri dans des centres d’accueil, et même l’envoi de messages via FR-Alert, le dispositif qui fait vibrer les téléphones des habitants d’une zone en cas d’urgence.

Une organisation millimétrée

Ce genre d’exercice ne s’improvise pas. Sous la houlette de la préfecture de Charente-Maritime et de l’agglomération de La Rochelle, des mois de préparation ont été nécessaires. La société Numérisk a épaulé les autorités pour construire un scénario crédible et organiser les différentes étapes.

Sur le terrain, des barrières anti-inondation (batardeaux) seront mises en place, des itinéraires d’évacuation testés, des équipes de secours déployées. Les communes testeront leur capacité à agir vite, communiquer clairement, protéger les plus fragiles. Ce sera aussi l’occasion de vérifier si les dispositifs prévus en théorie fonctionnent en pratique : accès aux points hauts, continuité des réseaux électriques et télécoms, coordination entre les maires et les services de l’État…

Une population actrice de sa sécurité

Ce qui distingue EOLE 2025 d’un simple test technique, c’est la volonté d’impliquer les habitants. Des citoyens volontaires participeront aux mises en situation, certains joueront le rôle d’habitants à évacuer, d’autres seront accueillis dans des centres d’hébergement simulés. Cette participation permet de prendre conscience des réflexes à adopter : que faire si l’eau monte chez moi ? Où trouver les infos fiables ? Qui prévenir si je connais quelqu’un de vulnérable ?

Ce type d’exercice donne aussi du sens aux alertes que l’on reçoit parfois sur son téléphone sans vraiment comprendre d’où elles viennent ou quoi en faire.

Une région pionnière, un modèle à suivre

Avec EOLE 2025, la Charente-Maritime montre qu’on peut anticiper plutôt que subir. Et ce n’est pas un hasard si l’agglo rochelaise est en première ligne : 21 % de son territoire est situé sous le niveau de la mer. Le dérèglement climatique rend les submersions marines plus fréquentes et plus intenses. S’y préparer n’est donc pas un luxe, mais une nécessité collective.

Et au-delà de La Rochelle, d’autres territoires pourraient s’inspirer de cette démarche : Guadeloupe, Guyane, Corse, Camargue… partout où la mer menace de grignoter la terre, les habitants ont tout intérêt à devenir acteurs de leur sécurité.

Et vous, vous feriez quoi si l’eau montait ?

L’exercice EOLE 2025 n’est pas seulement une affaire de spécialistes ou d’élus. Il pose une question simple : sommes-nous prêts, individuellement et collectivement, à réagir face à une alerte réelle ? C’est en simulant le pire que l’on apprend à mieux l’éviter. Alors la prochaine fois qu’un message d’alerte s’affiche sur votre écran, vous saurez peut-être un peu mieux quoi faire. Et c’est déjà beaucoup.