Quand une usine s’invite dans le paysage
Dans l’Aude, les paysages oscillent entre vignobles, littoral et zones urbaines. Mais derrière ce décor, un autre visage se dessine : celui des installations industrielles, parfois discrètes, souvent essentielles à l’économie locale, mais non sans risque. Le département compte plusieurs sites classés pour leur dangerosité potentielle, encadrés par des réglementations strictes. Accidents chimiques, pollution de l’air, incendies ou explosions : ces scénarios sont rares mais pris très au sérieux. Et certains territoires, comme Narbonne ou Port-la-Nouvelle, vivent avec cette réalité en toile de fond.
Sites classés, entre prévention et surveillance
Dans l’Aude, une vingtaine d’installations sont classées Seveso, dont certaines à seuil haut, ce qui signifie qu’elles manipulent des substances pouvant provoquer des incidents majeurs. C’est le cas du site de traitement des résidus de l’usine d’uranium Orano Malvési, à Narbonne. Installée en périphérie de la ville, cette unité traite près d’un quart du minerai d’uranium utilisé dans les centrales françaises. Elle est sous haute surveillance en raison des produits chimiques employés dans le procédé, comme l’acide nitrique. En cas de fuite, les conséquences sanitaires et environnementales pourraient être significatives.
Autre point de vigilance : le port industriel de Port-la-Nouvelle, qui accueille des dépôts d’hydrocarbures, des installations de stockage de produits pétroliers et un trafic maritime important. Des Plans de Prévention des Risques Technologiques (PPRT) y sont en place, notamment autour des zones de stockage, afin de limiter l’urbanisation et de protéger les populations.
Les populations concernées et les plans de secours
La présence de ces sites impose la mise en œuvre de plans spécifiques comme les PPI (Plans Particuliers d’Intervention), rédigés par la préfecture. Ces documents détaillent les mesures à prendre en cas d’accident industriel majeur : alertes à la population, zones de confinement, circuits d’évacuation… À Narbonne, des campagnes de sensibilisation ont lieu régulièrement pour informer les habitants des consignes à suivre en cas d'incident sur le site d’Orano.
À Lézignan-Corbières ou encore Trèbes, plus en retrait des grands pôles industriels, des entreprises classées ICPE (Installations Classées pour la Protection de l’Environnement) manipulent également des produits chimiques ou énergétiques, dans le cadre d’activités agricoles, de traitement des déchets ou de fabrication. Ces structures ne présentent pas le même niveau de risque qu’un site Seveso, mais elles font l’objet de contrôles réguliers et de mesures de prévention adaptées.
Un équilibre à construire dans la durée
Le défi, pour le département, reste de concilier développement économique et sécurité des habitants. La préfecture, en lien avec la DREAL Occitanie, veille à la conformité des installations et actualise régulièrement les dispositifs de prévention. Les communes, de leur côté, doivent intégrer ces risques dans leur plan local d’urbanisme. À cela s’ajoute un enjeu de transparence et de pédagogie : expliquer, sans dramatiser, que le risque zéro n’existe pas, mais que des mesures concrètes sont en place pour y faire face.
La mémoire collective, dans l’Aude comme ailleurs, n’a pas oublié les catastrophes industrielles d’AZF à Toulouse ou de Lubrizol à Rouen. Si l’Aude n’a pas connu de drame de cette ampleur, la vigilance reste de mise. Car comprendre ces risques, c’est déjà mieux s’y préparer.