Une réalité qui brûle l’été… et les chiffres
Depuis les années 1970, les Alpes-Maritimes ont enregistré 7 675 feux de forêt. C’est un chiffre impressionnant, mais pas surprenant pour qui connaît ce territoire. Ici, le climat méditerranéen impose chaque été une sécheresse plus ou moins longue, les températures grimpent vite, et le vent peut attiser le moindre départ de feu. La géographie n’arrange rien : entre littoral et montagne, les terrains sont accidentés, souvent difficiles d’accès pour les pompiers, surtout dans les zones reculées ou escarpées. Et comme si ça ne suffisait pas, l’urbanisation s’est peu à peu étendue sur des zones qui, autrefois, étaient isolées. Résultat : de plus en plus de maisons se retrouvent en bordure de massifs forestiers, dans ce qu’on appelle l’interface habitat-forêt, ce qui augmente considérablement les risques pour les habitants. Chaque été, les pompiers du SDIS 06 interviennent sur plusieurs dizaines de départs de feu, parfois pour quelques mètres carrés, parfois pour des dizaines d’hectares. Et derrière les chiffres, ce sont des vies bouleversées, des maisons évacuées, des paysages transformés, parfois pour des années. Cette fréquence de sinistres est aussi le signe d’un climat qui évolue : les étés sont plus longs, les épisodes caniculaires plus fréquents, et la végétation plus sèche, donc plus inflammable.
Des moyens de lutte solides, mais pas infaillibles
Heureusement, les Alpes-Maritimes sont parmi les départements les plus préparés à ce type de risque. Depuis les années 1980, le Plan Départemental de Protection des Forêts Contre les Incendies (PDPFCI) pilote une série d’actions concrètes pour réduire la vulnérabilité du territoire. Des pistes DFCI (défense des forêts contre l’incendie) sont aménagées pour permettre aux camions de pompiers d’accéder aux massifs, des zones sont débroussaillées chaque année, et des systèmes de surveillance, parfois aériens, sont déployés dès les premiers signes de chaleur. C’est aussi dans ce département que sont testés régulièrement des dispositifs expérimentaux, comme la modélisation du risque via satellite ou les drones de reconnaissance. Mais malgré ces moyens, la prévention passe aussi, et peut-être surtout, par les comportements individuels. Un mégot jeté sur le bas-côté, un barbecue mal maîtrisé, une étincelle de débroussailleuse : la majorité des incendies est d’origine humaine. Les campagnes de sensibilisation rappellent donc chaque année les bons réflexes à adopter, notamment dans les zones sensibles. Et dans les communes, les obligations légales de débroussaillement s’appliquent aux particuliers : il ne s’agit pas de règles symboliques, mais de véritables boucliers de sécurité. Parce qu’un feu de forêt qui atteint une habitation, c’est déjà trop tard.
Préserver le vivant, prévenir les flammes
Quand on parle de feux de forêt, on pense souvent aux pins qui brûlent et aux flammes qui dévorent les collines. Mais il ne faut pas oublier tout ce que ces incendies emportent avec eux : la biodiversité, les sols, l’eau, les paysages. Dans les Alpes-Maritimes, les forêts sont à la fois un patrimoine écologique et un atout économique : elles attirent les promeneurs, fixent le sol, régulent les températures, abritent une faune souvent unique. Quand elles brûlent, ce sont des années de croissance, d’équilibre naturel, qui s’effondrent. Et après l’incendie, c’est souvent l’érosion qui prend le relais. Sans végétation pour retenir la terre, les pentes glissent, les eaux de pluie ruissellent plus vite, aggravant les risques d’inondation. C’est pourquoi la gestion des forêts et la prévention des incendies doivent être pensées ensemble. L’enjeu n’est pas uniquement de réagir aux feux, mais de construire un territoire plus résilient, où l’on tient compte du climat de demain. Cela veut dire : planter des essences moins inflammables, penser les nouvelles constructions en lien avec le risque feu, informer mieux et plus largement, et surtout impliquer tous les acteurs, du randonneur au maire, dans la préservation active de ce bien commun qu’est la forêt.