L'ÉVOLUTION DU CADRE RÉGLEMENTAIRE DE SÉCURITÉ

Des évolutions réglementaires (2 décrets et 5 arrêtés du 24 septembre 2020, complétés par 3 arrêtés du 22 septembre 2021) sont intervenues pour renforcer substantiellement les règles applicables aux installations industrielles soumises à réglementations (ICPE), dont les sites « Seveso » et les entrepôts de stockage. Elles renforcent également les prescriptions relatives à la prévention des risques d’incendie et à la limitation de leurs conséquences.

Ces prescriptions, portant à la fois sur les mesures de sécurité, les procédés de fabrication et la conception même des sites, représentent un investissement estimé de 2 à 3 milliards d'euros, d'ici 2027, pour les industriels en France.

UNE AUGMENTATION MARQUÉE DU NOMBRE DE CONTRÔLES

Depuis cinq ans et ces évolutions réglementaires, la nature et le volume des contrôles des installations classées ont sensiblement évolué.

Conformément à l’objectif fixé par le ministère en charge de l’Environnement, la présence des inspecteurs sur le terrain s’est accrue. Si l’on compare le nombre d’inspections réalisées au premier semestre 2024 et celui du premier semestre 2019, on note une augmentation de 58 % de contrôles, passant de 200 (1er semestre 2019) à 316 (1er semestre 2024), en Seine-Maritime.

Ces inspections incluent des contrôles périodiques de sites (au moins une fois par an pour les sites Seveso seuil haut et au moins une fois tous les trois ans pour les autres sites Seveso) et des visites thématiques, c’est-à-dire ciblées sur des enjeux identifiés comme forts dans la région ou au niveau national (ex : le bon fonctionnement des installations de détection incendie, d’extinction incendie ou de rétention des eaux d’incendie...).

Sur les 316 inspections du 1er semestre 2024, 160 inspections ont été réalisées dans le cadre du suivi périodique des ICPE.

Le ciblage des visites a lui aussi évolué, pour viser plus précisément certains établissements déjà connus de l’inspection, mais aussi réaliser des contrôles sur des établissements plus rarement visités. Pour rappel, l’ensemble des établissements situés dans un rayon de 100 mètres autour des sites Seveso, qu’ils soient classés ou non, ont été visités après l’incendie de 2019, afin de vérifier l’absence de risque « d’effet domino ».

Les inspections ciblées ne remplacent donc pas les contrôles approfondis et périodiques mais s’y ajoutent.

Le suivi administratif opéré à la suite des contrôles a donné lieu en 2023 à 86 mises en demeure en Seine-Maritime, contre 48, en 2019.

Les suites pénales données aux visites ont elles aussi évolué en Seine-Maritime. Ainsi, le nombre de procès verbaux établis à l’issue de ces contrôles a augmenté de 20 % sur la période, entre 2019 et 2023.

Depuis l’incendie de Lubrizol et afin de mener à bien ces contrôles périodiques et thématiques, le nombre d’inspecteurs des installations classées a augmenté. Ainsi, la Dreal Normandie a bénéficié d’un renfort de 8 postes dont 4 en Seine-Maritime.

POURSUITE DES SUIVIS SANITAIRES ET DES SUIVIS SUR LES IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

• Surveillance épidémiologique de la population de la zone concernée

Santé publique France a mis en place une surveillance épidémiologique visant à décrire l’état de santé de la population vivant dans la zone exposée à l’incendie. Les indicateurs des évènements sanitaires suivis portent sur les pathologies respiratoires, cardiovasculaires, de santé mentale, de périnatalité et de tumeurs malignes.

Cette surveillance s'inscrit dans un dispositif global d'évaluation épidémiologique des conséquences à court, moyen et long termes sur la santé, mis en place immédiatement après l'accident en population générale et auprès des travailleurs. Ce dispositif se poursuit actuellement.

De premiers résultats de la surveillance en population sont publiés depuis juillet 2021 et sont complétés au fil de l'eau. Ainsi, le 12 septembre 2023, Santé publique France a publié les résultats des études de surveillance épidémiologique de la population générale portant sur la délivrance des psychotropes au sein de la population dans lesquelles il apparaît qu'il n'y a pas eu d'évolution dans ce domaine avant et après 2019. Les prochains résultats attendus concerneront la santé cardiovasculaire puis périnatale et respiratoire, à compter de 2025.

• Surveillance épidémiologique spécifique des travailleurs de la zone concernée

En 2021, l’expertise pluridisciplinaire du Groupe d’alerte en santé travail (Gast) Normandie préconisait d’inscrire les conditions d’exposition à l’incendie dans les dossiers médicaux en santé au travail pour certains groupes de travailleurs, mais aucun suivi médical spécifique pour ces travailleurs n'était identifié comme nécessaire.

Toutefois, dans un objectif de prévention, un protocole a été mis en place en mai 2023 par Santé Publique France pour assurer ce suivi épidémiologique des travailleurs exposés à l’incendie ou à ses suites de façon similaire à celui mis en place pour la population générale.

• Suivi de l'impact environnemental

En 2019, l’Anses a été saisie par la direction générale de l’alimentation (DGAL) pour évaluer la contamination, issue de l’incendie de l’usine Lubrizol, dans les denrées alimentaires. Les résultats d’analyse des contaminants recherchés dans les prélèvements effectués au cours de cette première phase (2019) ne « mettaient pas en évidence de sur-contamination de la zone à la suite de l’incendie par rapport au bruit de fond de contamination environnementale lié aux activités historiques de la région ».

Une seconde phase d’étude (2020-2023) consistait en la mise en place d’une « surveillance renforcée, à moyen voire long termes, de la zone fortement exposée à la fumée de l’incendie pour estimer le risque de bioaccumulation ou de bioamplification des polluants ».

Dans ce cadre, 1315 prélèvements de denrées, incluant des denrées agricoles d’origine végétale à destination des consommations humaine ou animale et des denrées alimentaires d’origine animale destinées à la consommation humaine », ont été analysés. Il n’a pas été observé de dépassement des teneurs maximales réglementaires, hormis pour 1 échantillon d’œuf (sur les 64 prélevés – dépassement du seuil pour les dioxines/polychlorobiphényles) et 1 échantillon de miel (sur les 29 prélevés – dépassement du seuil pour le plomb). Pour ces dépassements, il n’a pas été possible d’établir une corrélation entre l’incendie de Lubrizol et les non-conformités constatées.

Conformément aux recommandations de l’Anses, les services de l’État poursuivent ces plans de contrôles et de surveillance.

À noter, toutes ces études sont recensées et mises à disposition du public sur le site internet de la préfecture de la Seine-Maritime.

LE RENFORCEMENT DE LA CULTURE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA TRANSPARENCE

Divers outils et initiatives ont été déployés pour renforcer la culture de la sécurité parmi la population :

- FR-Alert est un outil d’alerte, déployé en juin 2022, combinant alerte sonore, visuelle et message. Il permet de délivrer des consignes claires sur la conduite à tenir, lors de sinistres, intervenant de jour comme de nuit.

Ce dispositif innovant modernise substantiellement les modes d'alerte et d'information à la population. Il permet d'informer en temps réel toute personne détentrice d'un téléphone portable de sa présence dans une zone de danger, des comportements précis à adopter et des consignes de sécurité à suivre pour se protéger.                       L’outil FR-Alert a déjà été testé quatre fois dans le département : le 28 juin 2022 dans le cadre d’un exercice attentat aux abords du zénith de Rouen, le 13 octobre 2022 dans le cadre d'un exercice nucléaire à la centrale de Paluel, le 13 octobre 2023 lors d'un exercice industriel dans le secteur du Havre et le 14 mai 2024 lors d'un exercice industriel sur la commune de Saint-Jouin-de-Bruneval.

Un nouvel exercice, avec activation de FR-Alert, dans l'agglomération de Rouen, est d'ores et déjà programmé le 15 octobre 2024.

– Les moyens et outils dédiés à la culture de la sécurité ont été renforcés auprès des différentes populations concernées (élus, grand public, public scolaire…) avec la mise à disposition de documents d’information préventive sur les risques (plaquettes d’information, Document d’information sur les risques majeurs – DICRIM, guides de réalisation des Plans communaux de sauvegarde (PCS), des PPMS – Plan particulier de mise en sécurité – pour les établissements scolaires…).

ZOOM SUR… LES PLANS COMMUNAUX DE SAUVEGARDE

La situation progresse… mais il reste du travail

Le plan communal de sauvegarde (PCS) est le document qui vise à organiser les moyens communaux existants afin de faire face aux situations d’urgence. Face au constat que nombre de communes ne respectaient pas leurs obligations de réalisation de ce PCS, les services de l’État ont renforcé, ces dernières années, leur accompagnement des collectivités : mise en place d’outils, de trames d’exercices, au niveau local et national, courriers de relance… En Seine-Maritime, 453 communes doivent obligatoirement avoir élaboré un PCS. Au 1er septembre 2024, 146 communes n’étaient pas en règle, soit un taux de réalisation de 67,8%. Sur le périmètre de la Métropole Rouen Normandie : 62 communes sur 71 devraient disposer d’un PCS. 7 communes n’en sont toujours pas dotées, soit un taux de réalisation de 88,7 %. Les EPCI (métropoles, communautés d'agglomération, de communes...) ont, elles aussi, obligation de rédiger un plan intercommunal de sauvegarde (PICS). Le 22 octobre prochain, les services de la préfecture organisent une rencontre de la sécurité civile à destination de ces EPCI. L'occasion de leur rappeler cette obligation et de leur présenter les actualités sur la distribution des comprimés d’iode et les dispositions opérationnelles de soutien aux populations.

– La plateforme « Georisques » , mise en place par les services de l’État, permet de faciliter l’accès de tous aux données sur les risques naturels et technologiques près de chez soi, depuis le 1er janvier 2022.

Elle a été conçue et améliorée pour devenir le site internet de référence en matière de culture de la résilience. Cette plateforme est mise à jour en temps réel, à l’issue de chaque visite ou mesure prise dans un site Seveso. Géorisques sert ainsi de base de données à la nouvelle cartographie dynamique régulièrement mise à jour que la Métropole Rouen Normandie met en place. Parmi les données reprises sur le site de Géorisques se trouvent notamment les dates et les rapports des dernières inspections effectuées par la Dreal Normandie, ainsi qu’un lien vers les arrêtés préfectoraux pris à la suite de ces contrôles.

– La Journée nationale « Tous résilients face au risque », le 13 octobre. Cette journée vise à sensibiliser, à informer et à acculturer tous les citoyens aux risques naturels et technologiques qui les environnent afin d’adopter les bons comportements en cas de catastrophe et de devenir acteur de sa propre sécurité. Dans ce cadre, différentes initiatives proposées par l’État, les collectivités territoriales, les associations, les industriels… sont labellisées. Ainsi, le 13 octobre 2023, un exercice Plan particulier d’intervention (PPI) sur la zone industrielle et portuaire du Havre a été réalisé avec le déclenchement notamment des outils d’alerte comme FR-Alert. Cette année, un exercice d’ampleur est de nouveau programmé à cette période sur l’agglomération de Rouen.

- Chaque année, 4 à 5 exercices d’ampleur sont réalisés dans le département sur différentes thématiques de risques pour s’entraîner mais aussi sensibiliser les populations sur l’existence de ces risques et rappeler les consignes à adopter en cas de survenance.

– Une réserve départementale de sécurité civile a été créée à la fin de l’année 2022. Elle fédère l’ensemble des acteurs de la sécurité civile de la Seine-Maritime : le service départemental d’incendie et de secours (SDIS76), les associations agréées de sécurité civile, les réserves communales, les anciens sapeurs-pompiers et tous les citoyens souhaitant s’investir dans une mission de protection civile. Cette réserve a pour objectif d’améliorer la préparation de tous les habitants de la Seine-Maritime à la prise en compte des risques et des catastrophes.

– Des évolutions concrètes mises en place par le SDIS76, comme la systématisation du déploiement d’un réseau de mesures atmosphériques dès qu’un incendie impliquant des matières dangereuses se déclenche près de zones habitées, grâce aux moyens de la cellule mobile d’intervention chimique (CMIC) et à l'équipement de prélèvement atmosphérique fourni par une convention entre le SDIS et Atmo Normandie

Pour aller plus loin Dossier Lubrizol sur le site internet de la préfecture de la Seine-Maritime: https://www.seine-maritime.gouv.fr/Actions-de-l-Etat/Securite-et-Defense/Securite-civile/Risques-naturels-et-technologiques/Risque-industriel/Incendie-Lubrizol-et-NL-Logistique-du-26-septembre-2019/Incendie-Lubrizol-et-NL-Logistique-du-26-septembre-2019

Site internet de Santé publique France: https://www.santepubliquefrance.fr/presse/2023/incendie-des-entrepots-de-lubrizol-et-nl-logistique aucune-evolution-defavorable-de-la-delivrance-de-psychotropes

Source: Préfet de Seine-Maritime